APV-FLEGT – L’Union Européenne marche sur le Cameroun et le Bassin du Congo

La démarche de l’UE vis-à-vis des pays des bassins forestiers de l’Amazonie et du Bornéo Mekong contraste avec l’épouvantail de sanctions qu’elle agite sur les pays du bassin du Congo au sujet de l’application des réglementations forestières.

 

 

 

Fin novembre 2024, l’UE prévoit la rupture de son Accord de Partenariat Volontaire (APV) sur la gestion forestière avec le Cameroun. L’information, contenue dans une proposition de décision au Conseil de l’Union européenne (UE), fait des choux gras dans les milieux forestiers.  Pour soutenir sa démarche, l’UE convoque une litanie de manquements de la part du Cameroun dans la mise en œuvre de l’Accord conclu le 1er décembre 2011.

Si, d’une manière générale, les problèmes de gouvernance sont décriés notamment la persistance des actes corruption et l’exploitation forestière illégale, c’est davantage le manque de volonté politique de la part du Cameroun qui est pointé du doigt.  « La forte volonté politique du Cameroun de s’engager dans l’APV, matérialisée par un calendrier de mise en œuvre des plus ambitieux est en décalage avec les actes posés par le pays », peut-on lire dans la proposition de décision soumise à l’examen du Conseil de l’UE.

 

 

Selon le projet de décision en circulation, la plus grande déception de l’UE au sujet dudit accord porte sur l’application des autorisations FLEGT par le pays. « Cela fait toutefois 13 ans désormais que l’APV est rentré en vigueur et le régime d’autorisation FLEGT n’a toujours pas vu le jour, ce qui revient à dire que l’APV n’est pas opérationnel », regrette l’UE dans son projet de décision portant rupture de l’APV avec le Cameroun.

Malgré tout, le Cameroun de son côté se félicitent des progrès réalisés dans le secteur forestier depuis son engagement dans le FLEGT. Le cadre juridique et réglementaire a sensiblement évolué, notamment avec la récente révision de la loi forestière, mettant un accent sur la protection des ressources et la réduction des actes d’illégalité. Plus encore, le Ministère des Forêts et de la Faune a mis sur pied le Système Informatisé de Gestion de l’Information Forestière 2e génération (SIGIF2) qui garantit la traçabilité du bois. Ce système a d’ailleurs été l’objet de mésentente entre le Cameroun et l’Union européenne en ce concerne son contrôle.

 

 

L’UE, en son temps, voulait s’adjuger l’entier contrôle de cet instrument en conservant les codes sources, ce qui n’arrangeait pas la partie camerounaise. Pour des raisons de souveraineté, le Cameroun avait dû opter pour un système autonome, privilégiant ainsi ses intérêts.

Dans le contexte actuel, certains observateurs font une autre lecture de l’annonce de la rupture de l’APV de l’UE avec le Cameroun. Ces derniers y voient, en plus du désaccord sur le SIGIF2, une certaine frustration de la part l’UE incapable de soutenir la concurrence face aux asiatiques dans le marché du bois. Pour preuve, ces observateurs attirent l’attention sur un paragraphe du projet d’acte de décision : « Les exportations de bois de la République du Cameroun ont, en outre, été réorientées vers les marchés asiatiques, ce qui a eu pour effet de diluer l’incitation économique de l’APV et, partant, l’utilité de l’autorisation FLEGT ».

Il faut souligner que l’APV-FLEGT dans sa globalité est un échec.

Cet échec tire son origine de l’approche bilatérale adoptée par l’UE. Ses interventions dans le cadre du FED doublées de l’incapacité des pays de la COMIFAC à financer leurs politiques forestières lui confèrent une position dominante qui l’autorise pas à fragiliser les minces efforts de solidarités sous régionales. La généralisation amorcée des partenariats sur les forêts n’augure rien de bon et reproduira les mêmes.

Dans un contexte d’harmonisation des politiques forestières dans le Bassin du Congo, l’Union européenne devrait réexaminer sa diplomatie verte faite de menaces voilées et de décisions cavalières. Reste à revoir aussi, sa démarche à la fois curieuse et incohérente sur une même problématique (gouvernance forestière). Profitant de la faible capacité des pays d’Afrique centrale à fédérer leurs forces pour défendre les intérêts communs, de même que pour développer et défendre des positions communes, Bruxelles prend avantage sur un terrain fertile pour faire du deux poids deux mesures. Menaces de sanctions vis-à-vis des pays du bassin du Congo, et à l’opposé, option de négociation avec ceux de l’Amazonie et du Bornéo Mekong.

 

Par Arthur Metsam

 

 

 

 

 

 

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