Un rapport de l’ONU publié mercredi qualifie la situation des droits de l’homme en République centrafricaine d’« alarmante », précisant qu’au cours de la dernière année plusieurs groupes armés ont tenté « avec violence » de perturber les élections et que, face à ces actes, les forces de défense et de sécurité du pays ont lancé des opérations militaires pour reprendre le contrôle de certains territoires. 

NEW YORK, USA, le 05 Août 2021,-/African Media Agency (AMA)/-« Toutes les parties au conflit continuent de commettre des atrocités, alors que la situation sécuritaire se détériore, en particulier dans les provinces », a déploré le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA), Mankeur Ndiaye. 

M. Ndiaye a affirmé qu’« une solution politique à cette crise, ainsi que le plein respect en tout temps du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire par toutes les parties au conflit constituent le seul moyen viable d’assurer une paix et un développement durables en République centrafricaine ». 

526 cas de violations et d’abus, plus 1200 victimes 

Ce rapport porte sur la période allant de juillet 2020 à juin 2021 dans le contexte des élections présidentielles, tenues en décembre 2020, ainsi que celui des élections législatives, qui se sont déroulées en décembre 2020 et en mars et mai 2021.

Durant cette période, la division des droits de l’homme (DDH) de la MINUSCA a enregistré 526 cas de violations et d’abus des droits de l’homme et du droit international humanitaire à travers le pays. Ces violations ont fait au moins 1.221 victimes, dont 144 personnes civiles ou hors de combat, qui ont été tuées par les parties au conflit.  

« On compte parmi les violations et abus recensés des exécutions sommaires et extrajudiciaires, des actes de torture et de mauvais traitements, des arrestations et détentions arbitraires, le recours disproportionné et inutile à la force, des violences sexuelles liées au conflit et des violations graves aux droits de l’enfant, notamment leur recrutement par les parties au conflit », ont précisé les auteurs conjoints du rapport le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) et la Mission des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA).

Le rapport indique par ailleurs que les attaques et les menaces d’attaques ont poussé des milliers de civils à fuir leur domicile.

Groupes armés et forces de l’ordre sont responsables des incidents 

Une coalition de groupes armés, connue sous le nom de CPC (Coalition des Patriotes pour le Changement) est responsable de plus de la moitié des incidents recensés (54 %) dans le rapport. 

« La CPC a tué et enlevé des civils, lancé des attaques contre des Casques bleus de l’ONU, pillé des locaux d’organisations humanitaires, menaçant leur personnel, et incendié des bureaux de vote. Le 19 mars, dans la préfecture de la Ouaka, un groupe armé affilié à la CPC a tué trois commerçants, après les avoir ligotés et torturés. Leurs corps ont été retrouvés avec leurs cartes d’électeur attachées autour de leur cou », ont fait valoir les instances onusiennes. 

Les Forces armées centrafricaines (FACA), les Forces de sécurité intérieure (FSI) et d’autres personnels de sécurité, notamment des instructeurs militaires russes déployés dans le cadre d’un accord entre le Gouvernement de la République centrafricaine et celui de la Fédération de Russie ainsi que des compagnies militaires privées opérant dans le pays, sont responsables de 46 % des incidents confirmés. 

Des preuves crédibles recueillies par la Division des droits de l’homme de la MINUSCA (DDH) indiquent que ces autres membres du personnel de sécurité ont été impliqués dans des formations militaires et ont participé activement à des opérations militaires, notamment en arrêtant des suspects et en commettant des traitements inhumains et des actes de torture sur certains d’entre eux.

À plusieurs reprises et dans divers lieux, ils auraient également été impliqués dans des exécutions extrajudiciaires.

La communauté musulmane et les Casques bleus pris pour cible

La DDH a également confirmé une augmentation du nombre d’attaques sur les membres de la communauté musulmane par les FACA, les FSI et autres personnels de sécurité entre février et juin 2021. 

D’autres informations recueillies indiquent que des personnes musulmanes continuent d’être prises pour cible en raison de leur affiliation présumée avec les groupes armés. 

Les Casques bleus de la MINUSCA ont été attaqués à une vingtaine de reprises par des groupes armés et des FACA. Durant cette période, sept Casques bleus ont perdu la vie lors d’attaques perpétrées par des groupes armés. De telles attaques, qui visent à entraver le mandat de protection des civils de la MINUSCA, sont susceptibles de constituer des crimes de guerre. 

Un pas positif dans la lutte contre l’impunité 

Le Gouvernement centrafricain a récemment adopté plusieurs mesures pour promouvoir et protéger les droits de l’homme, dont la mise en place, le 4 mai dernier, d’une commission d’enquête spéciale chargée d’enquêter sur les violations du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire en lien avec les élections. Selon le rapport, cette démarche « représente un pas positif dans la lutte contre l’impunité ».  

« Il est essentiel de traiter les violations des droits de l’homme passées et présentes d’une manière qui soit pertinente pour les victimes afin de rompre le cycle long et douloureux de la violence en République centrafricaine », a déclaré Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet. 

 À cette fin, Mme Bachelet estime qu’il est « nécessaire de mener des enquêtes approfondies, impartiales et efficaces sur toutes les violations et tous les abus présumés, et leurs auteurs doivent impérativement répondre de leurs actes ».  

Cesser toute attaque sur la population civile 

Dans ses recommandations, le rapport appelle les groupes armés à cesser toutes leurs attaques sur la population civile, y compris la violence sexuelle et le recrutement d’enfants, et à participer à nouveau au processus de paix. 

Le rapport demande par ailleurs au Gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les responsables des violations et abus des droits de l’homme aient à répondre de leurs actes, et « pour créer un environnement capable de protéger les civils et les travailleurs humanitaires ». 

Il appelle également le Gouvernement à veiller à ce que les FACA, FSI et autres membres du personnel de sécurité libèrent tous les bâtiments civils, « dont les écoles et les hôpitaux, qu’ils occupent illégalement ».  

En outre, le rapport exhorte la communauté internationale à soutenir le Gouvernement dans ses efforts pour lutter contre la culture de l’impunité qui règne dans le pays et à fournir le soutien nécessaire à la professionnalisation des FACA et des FSI dans le but de les appuyer « dans leur rôle premier de protection des civils et de promotion et de respect des droits de l’homme en toutes circonstances ». 

Distribué par African Media Agency (AMA) pour ONU Info. 

Source : African Media Agency (AMA)

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