Conseil Supérieur de la magistrature :  De bouclier du pouvoir judiciaire au sujet du pouvoir exécutif

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Conseil Supérieur de la magistrature :  De bouclier du pouvoir judiciaire au sujet du pouvoir exécutif

L’instance dont la vocation est d’assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire vient de se réunir autour du Président de la République Paul Biya, véritable caution de son organisation, sa composition, son fonctionnement, y compris de ses compétences.

 

 

Dans la majorité des États africains d’inspiration et d’expression juridique française, et plus particulièrement au Cameroun, il est institué un Conseil supérieur de la magistrature (CSM) dont la vocation est, dans l’ensemble, d’assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire. Mieux encore d’« assister » le Président de la République dans cette quête. La condition de cet organe est le reflet du vrai visage du pouvoir judiciaire et de son indépendance. Son organisation, sa composition et ses compétences demeurent cependant sujettes à caution. Malgré les réformes récurrentes dont l’institution est souvent l’objet ici et là, son autorité n’est presque jamais acquise.

 

 

La loi N°82-014 du 26 novembre 1982 fixe l’organisation et le fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature au Cameroun. Et dès l’article premier de ladite loi, il est précisé que le Conseil Supérieur de la Magistrature est présidé par le Président de la République. Et a l’article (2) de poursuivre que le Ministre chargé de la Justice en assure la Vice- Présidence. Deux acteurs clefs du pouvoir exécutif en première ligne de cette institution, censée garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire et donc de  ses membres. Des articles de loi qui viennent trahir en filigrane la dépendance fonctionnelle ainsi que la subordination organique apparente du CSM, vis-à-vis de l’exécutif.

 

 

« Le Président de la République, garant de l’indépendance de la magistrature est assisté, dans cette mission, par le Conseil Supérieur de la Magistrature. Il peut, à cet effet, le consulter sur toute question relative à l’indépendance de la magistrature », peut-on lire à l’article (10) dudit texte de novembre 1982. Toutes choses qui font dire a certains constitutionnalistes que « Bafoué, berné, sifflé, moqué, joué » à la manière du geai paré des plumes du paon de la fable de Jean de La Fontaine, le Conseil supérieur de la magistrature n’a jamais su ou pu épargner les brocards de la doctrine. Sa légitimité, sa crédibilité et partant son autorité seraient donc à construire. Et pourtant, … Si, en effet, la justice est perçue comme le premier devoir de l’État, l’indépendance est la rançon d’une justice crédible, sentinelle des libertés individuelles.

Ce trait de caractère qu’arbore la justice est l’une des vertus fondamentales qui justifie la « distance entre le jugement et ses influences ». Condition sine qua non, pour l’exigence de l’État de droit, préoccupation au plan universel, qui a conduit les constituants de la plupart des États du monde dans l’extériorisation de leur attachement à la démocratie à instituer un pouvoir judiciaire et à en consacrer l’indépendance par rapport aux pouvoirs exécutif et législatif dans leurs Constitutions respectives. Une indépendance plus une vue de l’esprit pour d’autres. Puisque le Président de la République, qui incarne en premier lieu le pouvoir exécutif, est dans le même temps, le président du Conseil Supérieur de la Magistrature, et par ricochet le premier magistrat.

Pour satisfaire à cette exigence, le Cameroun comme bon nombre d’États africains a, dans un élan qui alterne hardiesse et prudence, institué un pouvoir judiciaire indépendant. Afin de soutenir cette indépendance du pouvoir judiciaire, des garanties statutaires et fonctionnelles ont été instituées au profit des membres de ce corps.

Pour empêcher, comme soutiennent plusieurs universitaires, le pouvoir exécutif d’influencer l’évolution dans la carrière des magistrats, la Constitution a prévu en son sein un Conseil Supérieur de la Magistrature chargé d’assister le Président de la République dans la garantie de l’indépendance de la justice. Et de plus le fait que les sessions du CSM se tiennent au Palais de l’Unité au cœur de l’appareil fonctionnel du pouvoir exécutif, en dit long sur ces nombreuses interférences de l’exécutif sur le Conseil Supérieur de la Magistrature et donc du pouvoir judiciaire.

 

©Afrique54.net  ►Thierry Eba

 

 

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